Régaler ses enfants avec la cuisine de plantes sauvages
Aujourd’hui, je voulais partager avec vous mon (e-)rencontre avec Anne Gouverneur, une des spécialistes belges en matière de cuisine de plantes sauvages. Chaque jour, cette passionnée de gastronomie et de nature nous régale d’idées culinaires géniales sur sa page Facebook.
Car à l’heure de la rentrée, si on changeait nos habitudes ? C’est peut-être le moment de réapprendre des gestes ancestraux. La nature regorge de « mauvaises herbes » délaissées qui pourtant sont savoureuses et ultra riches en vitamines et oligo-éléments.
Plutôt que de faire la file dans les magasins à tout bout de champs et risquer d’attraper cette crasse, utilisons notre petite sortie quotidienne pour récolter notre dîner gastronomique du soir comme au bon vieux temps des chasseurs-cuilleurs…
Mais peut-on tout cueillir ? Est-ce que c’est bon ? Est-ce que les enfants vont apprécier ?
Anne nous dit tout…
Peux-tu nous en dire plus sur ton parcours ?
Depuis toujours j’habite la jolie région des Lac de l’Eau d’Heure. Je l’ai quittée 7 ans pour aller faire des études à l’ULB (Licence en journalisme et communication, agrémentée, parce que je suis passionnée par la Nature, d’une licence spéciale en environnement). Mon rêve alors : sensibiliser les gens au respect de l’environnement…
Depuis, suite aux aléas de la vie, je suis professeur de français dans un centre d’éducation et de formation en alternance (CEFA). Ce boulot me permet d’avoir pas mal de temps libre pour m’occuper de mes enfants, de mon jardin, de mes animaux, de mes passions.
J’ai aussi obtenu il y a peu un diplôme de restaurateur/traiteur-chef à domicile, afin d’avoir un accès à la profession pour peut-être, plus tard, proposer des repas à des chambres d’hôtes, ou simplement des ateliers de cuisine plantes sauvages.
Qu’est-ce qui t’as donné envie de te spécialiser dans la cuisine des plantes sauvages ? Qu’a-t-elle de particulier ?
Gamine, je me souviens de soupe aux orties, de salade de pissenlits et de cueillettes de champignons de prairies.
J’ai voulu, adulte, en savoir plus, en connaître plus. Je suis admirative de tout ce que Dame Nature peut nous proposer… Je suis passionnée de cuisine, et c’est l’occasion de découvrir (et de partager ensuite avec ma famille, mes amis) de nouvelles saveurs.
Depuis quelques années, je suis tous les ateliers possibles et inimaginables sur la cuisine des plantes sauvages comestibles.
Certains sont donnés par les botanistes purs et durs, et donc je trouve que cela ressemble plus à des ateliers de survie : s’il y a la guerre…Ou plus rien dans les magasins, on peut se nourrir à partir de plantes sauvages que l’on trouve au bord de nos chemins de campagne, dans nos bois. Par contre leurs ateliers sont trop basiques : pas assez de fantaisie, de gourmandise, trop bruts : des plantes + un peu d’huile et un peu de sel et poivre ; je trouve ça bof !
J’ai, par la suite, rencontré une super animatrice qui elle, a une approche différente et plus gourmande : elle s’appelle Lucille, je suis sa plus grande fan. Elle m’a appris beaucoup.
J’apprends aussi dans des livres spécialisés, je teste, je goûte, je mets ma petite touche…
Peut-on cueillir les plantes toute l’année ?
Certains spécialistes vous diront oui! Mais, personnellement, je préfère les plantes qui apparaissent de mars à novembre, grand max. J’ai fait des essais en octobre, mais je suis moins fan. C’est se nourrir pour se nourrir, avec bien moins de plaisir.
Y a-t-il des endroits qu’il vaut mieux éviter pour la cueillette?
Bien évidemment. Les chemins et les routes fréquentées, les bords de champs pulvérisés….
Toutes les plantes sont-elles comestibles?
Il semblerait qu’à l’inverse des champignons, 90% des plantes sont comestibles, et 10 % toxiques. Mais comestible ne veut pas dire goûtue…
Y-a-t-il des plantes qu’on peut aisément reconnaître, sans danger de se tromper avec une plante toxique ?
Il y en a plein ! Prenons déjà par exemple l’ortie… Facile à reconnaître. Et si on se trompe, on va la confondre avec ce que l’on appelle communément l’ortie blanche (le lamier blanc), ou le lamier pourpre, ou l’épiaire des bois (l’ « ortie puante ») qui sont elles aussi comestibles. Mais seule la première pique.
Au contraire, pour quelles plantes recommandes-tu d’être accompagné d’un spécialiste ?
On craint souvent que les cueilleurs novices ne confondent par exemple pour le moment l’ail des ours avec le muguet. Les feuilles peuvent se ressembler, sans doute, mais elles ne poussent pas dans les mêmes milieux, ni au même moment.
Je me méfierai plus de l’Arum (ou Gouet Tacheté. Quand sa fleur orange fluo apparaîtra, il n’y aura pas de danger, ni quand ses feuilles seront arrivées à maturité (et donc avec une forme particulière et surtout tachetées de noir) . Par contre, le gouet tacheté « sort » en même temps que l’ail des ours, et ses jeunes feuilles peuvent lui ressembler,… Et l’Arum aime le même milieu que l’Ail des ours !
L’ortie est une plante que tu utilises régulièrement dans tes préparations. Est-ce qu’on ne risque pas de se piquer quand on la mange ?
Une fois bien hachée, l’ortie ne pique déjà plus. Et cuite, encore moins ! Un petit truc tout simple pour l’apéro : mélanger du beurre ramolli avec des orties jeunes (ou juste les feuilles), un peu de jus de citron, le tout au mixeur. Étaler ça sur un bon petit toast : sympa et surprenant !
Après la cueillette, combien de temps ai-je pour les cuisiner ?
J’essaie de cuisinier au plus vite. Quoique parfois je vais cueillir un après-midi ; je nettoie mes plantes et les passe à l’essoreuse comme une salade, les mets dans un grand essuie vaisselle dans le bac de mon frigo et les y garde quelques jours…
Est-ce que les préparations peuvent de conserver ? Ou bien faut-il les déguster rapidement ?
Certaines plantes s’oxydent très vite (Comme par ex. l’ortie). Donc, dans un souci esthétique, c’est préférable de les manger assez rapidement. Des pestos peuvent se conserver des mois au frigo, certaines préparations peuvent être aussi congelées sans en être altérées (par exemple le pesto, mais aussi une pâte sablée à l’ail des ours). Un autre mode de conservation est aussi le séchage et la conservation en bocaux. J’ai, à l’entrée de ma cave, certaines fleurs séchées comme la Reine des prés qui attendent que l’envie me prenne d’en faire un délicieux dessert au goût vanillé. Une panna Cota, par exemple.
Les enfants peuvent-ils également apprécier ce type de cuisine?
J’ai deux ados à la maison ; ce sont mes premiers goûteurs, et ce depuis quelques années. Edouard, mon fils, qui n’est pas un fan de légumes, est mon meilleur critique : si lui aime, il y a forte chance que tout le monde apprécie !
Des crosses de fougère, des spaghettis à l’ail des ours, des gnocchis aux orties, des risottos, il aime tout ça ! Et le côté vanillé de certaines plantes, comme la reine-des-prés, dont j’ai parlé, incorporée dans des desserts, plait aux enfants.
Les tout-petits sont toujours épatés après avoir goûté quelques préparations. Quand je leur annonce, par exemple, qu’ils ont mangés des orties: amusant de voir leur air intrigué …
Pourrais-tu partager avec nous 1 ou 2 recettes faciles à réaliser, même pour les novices ?
Une bonne soupe à l’ail des ours ou aux orties, ou un pesto que l’on peut faire avec la plupart des plantes sauvages comestibles, à cette saison.
Pour le potage, je commence toujours avec une base d’oignons/échalottes. J’ajoute mes plantes sauvages lavées, grossièrement hachée, des dés de courgettes, et puis je recouvre le tout d’eau. Ajouter un ou deux dés de bouillon de poule, sel, poivre. Quand les courgettes sont cuites, mixer le tout. Idéalement, je rajoute une poignée de plantes que j’avais gardées pour la fin, quand je coupe la source de chaleur. Ainsi, elles cuisent, mais moins, et seront plus goûtues. Un peu de crème fraîche pour ajouter un peu de velouté avant de servir, et c’est tout !
Astuce:
Orties: toujours utiliser des jeunes pousses ou des sommités; éviter les grosses tiges trop dures et filamenteuses.
Merci Anne d’avoir partagé avec nous ton savoir et tes idées. Tu nous as vraiment donné envie de nous y mettre. Bientôt un livre? Hâte de le découvrir…
Du coup, depuis, j’ai réalisé des chips d’ortie et je dois dire que toute ma petite famille s’est régalée, y compris mon petit Will de 5 ans… Vous pouvez retrouver la recette sur la page » en pratique »…
Je suis toute excitée de découvrir vos idées et réalisations culinaires…
A très vite
2 commentaires
Marianne
Hello Caroline.
Encore une super idée cet article !!!
Merci pour ce blog, continue 🙂
caro24
Merci Marianne! J’ai hâte de voir tes réalisations culinaires si tu décides de t’y mettre!! Tu as un réel talent créateur!